Guillaume Guérard est enseignant-chercheur au sein du département « Nouvelles énergies » de l’ESILV. Il revient pour The conversation sur le concept d’efficacité énergétique et les enjeux associés.
D’ici à 2050, la demande énergétique mondiale devrait doubler. Les réseaux et la production actuelle ne pourront pas supporter cette charge sans un profond changement dans notre façon de consommer, qui passe notamment par une efficacité énergétique accrue.
Pour bien comprendre les enjeux de l’efficacité énergétique, il convient de rappeler tout d’abord ce qu’est le « rendement énergétique ». Ce dernier désigne, dans un processus donné, le rapport entre la valeur énergétique produite et la valeur énergétique consommée. Un rendement de 100 % – sans aucune perte énergétique – serait un système idéal
La production d’électricité pour une centrale nucléaire se situe, par exemple, aux alentours de 33 % (jusqu’à 37 % sur les EPR). C’est-à-dire que 33 % de l’énergie libérée est transformée en énergie électrique à destination du réseau.
L’efficacité énergétique représente, elle, le rendement énergétique complet d’un système. Elle découle du rendement en fonction de ce à quoi l’énergie va servir. L’efficacité énergétique d’une maison concernera ainsi le chauffage, en prenant en compte le rendement énergétique des appareils, mais aussi l’isolation, la ventilation, etc.
Améliorer l’efficience énergétique passe par la connaissance des données de consommation, « la conduite du changement », le choix des matériaux de construction et la mise en place de systèmes intelligents.
Données et amélioration de la consommation
Les matériaux ne sont pas la seule source de fuite énergétique dans un bâtiment. La disposition des appareils et l’usage que le personnel fait des radiateurs, des climatisations ou encore des ascenseurs peuvent être à l’origine de surconsommations importantes.
Dans une salle hébergeant des serveurs, on doit par exemple recourir à la climatisation pour maintenir la bonne température ; or la chaleur dégagée par ces serveurs pourrait être redirigée afin de chauffer le bâtiment.
Stimergy propose ainsi des plans de chauffage d’eau sanitaire grâce à la chaleur dégagée par leurs serveurs et estime réduire la consommation par deux en ce domaine.
De nouveaux services sont également proposés par Bouygues énergies ou Metron pour permettre, à partir d’une analyse détaillée des données du bâtiment, d’établir une proposition chiffrée et argumentée de programmes d’économie d’énergie selon les recommandations de l’Ademe. Ces programmes peuvent être d’ordre social, matériel et/ou logistique.
La conduite du changement
Depuis plus d’une décennie, nous avons pris l’habitude de trier nos déchets. Cela ne s’est pas fait du jour au lendemain, et nous avons appris, via les médias, les annonces municipales, etc. à en faire une pratique quotidienne. Ce processus global s’appelle « la conduite du changement » selon une terminologie empruntée au domaine du management.
Afin de sensibiliser le public à l’efficacité énergétique et aux économies d’énergie, il est nécessaire d’expliquer, de montrer, de donner des exemples.
Cela concerne, par exemple, une meilleure utilisation des ampoules à économie d’énergie ou de la veille des ordinateurs ; on peut aussi s’initier aux logiciels de pilotage énergétique.
Ces derniers, couplés à un ensemble de capteurs disposés dans le bâtiment, donnent toutes les informations énergétiques et environnementales à l’utilisateur pour une meilleure gestion des dépenses.
On le voit, l’aspect humain représente un facteur essentiel pour la réussite de la transition énergétique. Et notre façon de consommer à un impact majeur sur le réseau. Mais il n’est pas nécessaire de modifier ou de pénaliser son confort pour réduire l’impact énergétique. De simples gestes – comme garder une chaleur constante chez soi ou éteindre le chauffage lorsqu’on aère une pièce – permettent de réduire sa consommation. La pose d’un thermostat pourra offrir une assistance technologique pour systématiser cette surveillance.
Performance énergétique et matériaux
Les bâtiments représentent 44 % de l’énergie consommée, devant les transports (32 %) et l’industrie (21 %). Pour connaître l’efficacité énergétique d’une construction, le diagnostic de performance énergétique oblige d’évaluer la consommation énergétique du bâtiment.
Les certificats d’économie d’énergie ont ainsi pour mission d’améliorer l’efficacité énergétique des secteurs du bâtiment résidentiel et tertiaire, des transports, de l’industrie et des réseaux.
Les matériaux utilisés influent évidemment sur l’efficacité énergétique, en permettant, par exemple, de limiter les fuites énergétiques. La rénovation du logement/bâtiment doit donc se faire en tenant compte des matériaux les plus performants, que ce soit dans l’isolation thermique, la restitution de chaleur, etc.
Pour aider les utilisateurs à établir un diagnostic énergétique de leur habitation, le gouvernement a mis en place un site qui, en collaboration avec l’Ademe, fournit des échantillons de fiche de rénovation estimant les coûts et les retours sur investissements (voir l’exemple de cet immeuble de 1960 chauffé au gaz).
Quant aux nouvelles constructions, elles se doivent d’être le moins énergivores possible et le mieux adaptées aux nouvelles technologies (énergies renouvelables, thermostat, isolation, véhicules électriques, etc.).
Des appareils intelligents
Une fois le bâtiment et ses appareils optimisés et le personnel sensibilisé, l’efficacité énergétique peut être encore améliorée à l’aide d’appareils intelligents. Ces derniers, grâce à leurs algorithmes dédiés et à des réseaux de communication à plus ou moins grande portée, adaptent leur consommation par rapport à leur environnement et le comportement des usagers.
C’est ainsi le cas des thermostats : un système « intelligent » comme Ween enregistrera par exemple votre position et vos préférences de température. Il pourra dès lors prévoir quand et comment activer le réseau domestique pour répondre aux critères de confort de l’utilisateur.
Il faut enfin mentionner les développements du smart grid, ce réseau dont l’efficacité énergétique est assurée par une « surcouche » informatique d’intelligence artificielle et d’aide à la décision.
Article publié sur The Conversation
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